Chapitre 14
Lundi matin, sept heures. Je regarde longtemps le réveil, pendant que je récapitule: il est bel et bien sept heures du matin, nous sommes lundi, et je m'appelle toujours Steve, du moins il me semble...
Monday morning, 7 o'clock. I look at the alarm clock for a long time, during which I get up (récapituler means recap, I translate it as get up as he gains consciousness and looks around when waking up.): It's 7 o'clock in the morning, it's Monday, and my name is always Steve, at least it seems like that.
Je me lève lentement, de peur d'être encore ankylosé. À ma grande surprise, je me sens en forme, comme si mon overdose de sommeil avait enfin réussi à me guérir de mon immense fatigue. Je saute dans la douche, je dévore quelques rôties, et je me sens tellement d'attaque que j'envisage de profiter de mon dernier jour de congé pour aller faire du jogging parmi les pommiers. S'il faut que chacune de mes courses me laisse aussi vidé que la première, il vaut mieux que je me constitue des réserves.
I slowly wake up, due to the fear of still being in ankylosis (a medical condition where your joints hurt). To my big surprise, I feel fit, like if my sleep overdose had finally managed to cure me of my immense fatigue. I jump in the shower, I devour some toast, and I feel so on form (d'attack means on form) that I plan to take advantage of my last day off to go jogging among the apple trees. If each of my races must leave me as drained as the first, it is better that I build up reserves.
Je cours en peu, et tout va bien. Du moins dans mon corps... Quand j'imagine des autos en feu et des spectateurs qui hurlent, j'ai envie de laisser tomber les courses automobiles et de continuer à courir jusqu'au bout du monde, et même au-delà du bout du monde, continuer à courir dans le vide jusqu'à la prochaine galaxie, comme le Road Runner, qui peut se promener longtemps au-dessus du vide, du moins tant qu'il ne s'aperçoit pas qu'il n'y a plus rien sous ses pieds. Tant qu'on ne regarde pas en bas, il n'y a pas de danger. Tant qu'on ne regarde pas en bas, on peut toujours continuer...
I run a little, and everything is fine. At least in my body... When I imagine cars on fire and spectators yelling, I want to give up racing and run to the end of the world, and even beyond the end of the world, continue to run in the void until the next galaxy, like the Road Runner, which can walk for a long time above the void, at least until it notices that there is nothing left under his feet. As long as you don't look below, there is no danger. As long as you don't look below, you can always keep going...
Mais est-ce que j'ai envie de continuer? Qu'est-ce qui se passerait si je restais ici, demain matin? Si je faisais la grève? Mieux encore, si j'abandonnais tout? Je suis très heureux d'avoir participé à cette expérience, monsieur Allard, mais maintenant c'est fini, je ne tiens pas à être pilote de course et encore moins à mourir dans un tas de ferraille, d'ailleurs vous vous êtes trompé depuis le début, je ne suis pas celui que vous croyez..."
But do I want to continue? What will happen if I stay here, tomorrow morning? If I went on strike? Even better, if I abandon it completely? I'm very happy to have participated in this experience, Mr. Allard, but now it's over, I don't want to be a racing driver and be let alone and die in a scrap heap, besides, you were mistaken from the start, I am not who you think I am...
J'essaie de me changer les idées, mais je n'y arrive pas. Plus j'y pense, plus je me dis qu'il faut que ce cauchemar s'arrête, et le plus tôt sera le mieux. Jamais je ne pourrai supporter de voir cette foule de débiles semaine après semaine.
I try to change my mind, but I don't get there. The more I think about it, the more I tell myself that this nightmare must stop, and the earlier the better. I could never bear to see this crowd of morons week after week.
Je suis tellement décidé à abandonner que je cesse de courir, pour mieux y réfléchir.
I am so determined to give up I stop running, to better think about it.
Me voici justement tout près de la remise, mon endroit préféré... J'ouvre la porte et je la referme derrière moi, pour être au frais et à l'ombre, seul et en paix. Je vais m'asseoir sur le siège de la tondeuse, où je reprends tranquillement mon souffle en regardant le soleil qui ne fraie un chemin par les fissures des planches.
Here I am right near the warehouse, my favourite place... I open the door and I close it behind me, to be fresh and in the shade, alone and peaceful. I will sit down on the seat of the mower, where I quietly resume my breath looking at the sun which does not make its way through the cracks in the boards.
Abandonner. Tout abandonner. J'ai signé un contrat, c'est vrai, mais ce contrat ne vaut rien: j'étais mineur quand je l'ai signé. Et puis, à quoi ça servirait d'être jeune, si on ne peut pas se tromper? J'ai le droit de changer d'idée et de recommencer, j'ai le droit de faire des expériences, et même de faire des gaffes, j'ai le droit de répondre quand on frappe à la porte... Quand on frappe à la porte? Est-ce que j'ai bien entendu? Je prête l'oreille, et j'entends encore trois coups secs et rapprochés, suivis d'une vois:
Give up. Give it all up. I signed a contract, that's true, but the contract is worthless: I was a minor when I signed them. So what, what is the point of being young, if you can't make mistakes? I have the right to change my mind and restart, I have the right to do experiments, and even make graffiti, I have the right to respond when there is a knock on the door... When there's a knock on the door? Did I hear it right? I listen carefully (the literal translation is "I ready my ear", which seems to have no English counterpart), and I again hear 3 more short and close knocks, followed by a voice:
- Ouvre, Steve, je sais que tu es là...
- FBI OPEN UP Open the door, Steve, I know that you are there.
J'ouvre la porte et je me retrouve face à face avec la dernière personne que je pensais trouver là: Yan.
I open the door and I find myself face to face with the last person that I thought to find here: Yan.
- J'ai quelque chose à te montrer, Steve.
- I have a few things to show you, Steve.
La première idée qui me traverse l'esprit, c'est qu'il est venu me casser la gueule. Je regarde derrière lui, pour voir s'il est venu seul, mais je ne vois rien d'autre qu'une camionnette de livraison. Il n'y a personne au volant, et le monteur tourne encore. Sur le côté de la camionnette, une inscription: Salaison Atlantique.
The first thought that crosses my mind, was that he came to piss me off. I look behind him, to see if he came alone, but I don't see anything else other than a delivery van. No one is driving, and the engine is still running. On the side of the van, an inscription (can't seem to find a better word): Atlantic Salt Meat (Salaison Atlantique).
- C'est la camionnette de mon père, m'explique Yan, qui a surpris mon regard. C'est écrit salaison, mais il n'a jamais rien salé. En fait, mon père a un abattoir. Mais j'imagine que tu le savais déjà...
- This is my dad's van, Yan explains, which surprised my gaze. It says salt meat, but that he never salted anything. In fact, my dad has a slaughterhouse. But I assume (I believe that assume is more accurate than think) that you know it already...
- Pourquoi est-ce que je le saurais? Je ne sauvais même pas que tu avais un père.
- Why would I know this? I don't even know that you had a dad.
Yan a l'air tout étonné, et ça me rassure: je préfère qu'il soit étonné plutôt qu'hostile.
Yan looked surprised, and that reassures me: I prefer him being surprised rather than being hostile.
- J'oublie toujours que tu es nouveau dans le coin. On se voit peut-être beaucoup à l'école, mais on ne se dit pas grand-chose... Mais on parlera de mon père une autre fois, veux-tu? J'ai été obligé de le supplier à genoux pour qu'il me prête sa camionnette, et il faut absolument que je la rapporte avant midi. Grouille-toi!
- I always forget that you are new in this area. We may see each other a lot at school, but we don't talk much... But we will talk about my dad another time, will you? I had to beg him on my knees for him to lend me his van, and I absolutely have to return it before noon. Hurry up!
Sans même attendre ma réponse, il va s'installer au volant. Je ne prends pas le temps de réfléchir et je vais m'asseoir de l'autre côté.
Without even waiting for my response, he settled behind the wheel. I don't take the time to think and I sit on the other side.
- Ouvre la fenêtre, me dit-il aussitôt que j'ai bouclé ma ceinture.
- Open the window, he immediately told me as soon as I bucked my belt.
Je n'ai pas vraiment besoin de son conseil: il flotte dans ce camion une telle odeur de viande avariée que je dois absolument prendre une bouffée d'air frais si je veux survivre.
I don't really have to listen to him: There is such smell of spoiled meat floating in van I absolutely have to take a breath of fresh air if I want to survive.
- Quand je travaille avec mon père, dit Yan, il exige que les fenêtres soient toujours fermées. Il adore cette odeur. D'habitude, il en profite pour me faire quelques blagues que je n'oserais même pas répéter...
- When I work with my dad, Yan says, he requires the windows to always be closed. He loves this smell. Usually, he takes the opportunity to tell me a few jokes that I would not even dare to repeat...
Rien de plus facile que d'imaginer à quoi ressemble le père de Yan: les estrades étaient remplies de ce genre d'homme, samedi dernier.
Nothing is easier than imaging what Yan's dad looks like: the platforms were filled with this kind of men, last Saturday.
- C'est pour ça qu'il aime tant la course automobile, j'imagine, poursuit Yan.
- That's why he loves racing so much, I assume, Yan continues.
- Je ne vois pas très bien le rapport.
- I don't really see the connection.
- Moi non plus, dit Yan en haussant les épaules. Je disais ça pour parler, c'est tout. Tu m'en veux encore pour mon attitude de samedi?
- Neither do I, Yan said shrugging the shoulders. I just wanted to talk, that's all. (Literal translation is I said that to speak.) Do you still want me for my attitude on Saturday?
- On ne peut rien te cacher.
- I can't hide anything from you.
- Je te comprends. Mais réfléchis un peu, Steve: personne n'a le droit d'avoir d'amis, dans ce monde-là. Si j'avais montré que je te connaissais, les autres m'auraient tué. C'est pour ça que j'ai fait semblant de t'en vouloir... Veux-tu savoir ce qui arrive à ceux qui ont des accidents? Je vais te le montrer.
- I understand you. But reflect for a bit, Steve: No one have the right to have friends, in this world. If I reveal that I know you, the others would have killed me. It's for that that I pretended to blame you... Do you want to know what happens to those who went through accidents? I will show it to you.
- ... On s'en va à l'hôpital?
- ... Are we going to the hospital?
- Non, malheureusement... Mais tu verras par toi-même, nous y sommes presque. Regarde ça...
- No, sadly... But you will see for yourself, we are almost there. Look at that...
Du doigt, il me montre une longue palissade, au bord de la route. Par-dessus la palissade, on voit dépasser des grues et des piles de carcasses d'automobiles. Un ferrailleur. Une cour à scrap, comme on dit par chez nous. Un peu plus loin, une grosse enseigne, peinte à la main: Allard reciclage.
On point, he shows me a long fence. Above the fence, we see cranes and stacks of car carcasses protruding. A scrap dealer. A scrap yard, like we say around here. A little further, a large sign, painted by hand: Allard reciclage (Can not find any translation).
- Mon père connaît Allard depuis toujours, m'explique Yan. Ils étaient dans la même classe en première année. Mais mon père l'a finie, lui, et il a même fait la moitié de sa deuxième année. Allard n'a jamais appris son alphabet au complet, comme tu peux le voir.
- My dad always knew Allard, Yan explained to me. They were in the same class in the first year. But my dad finished the year, and he even made to the middle of his second year. Allard never learned his entire alphabet as you can see.
- ... Comment fait-il pour lire les contrats?
- Then how does he read the contracts?
- Il ne les lit pas. Il fait semblant.
- He doesn't, he pretends to.
Yan continue à rouler jusqu'à la fin de la palissade, puis il s'engage dans une petite route de terre et stationne finalement son camion dans un champ en friche. Aussitôt le moteur arrêté, Yan descend de son côté, et je m'empresse d'en faire autant: tant que le camion roulait avec les vitres baissées, on pouvait toujours survivre; maintenant qu'il est arrêté, l'odeur de viande avariée est insupportable.
Yan continues to drive until the end of the fence, then he enters a small dirt road and finally stations his van in a fallow field. Immediately the engine stopped, Yan goes down on his side, and I hasten to do the same: as long as the truck was driving with the windows down, we could survive; right now that has stopped, the smell of spoiled meat is unbearable.
Je sors donc du camion et je vais rejoindre Yan, qui marche le long de la propriété de M. Allard, une propriété immense, et qui semble entièrement entourée d'une haute palissade.
So I get out of the truck and I rejoin Yan, who walks along the property of Mr. Allard, a huge property, and which seems to be entirely surrounded by a high palisade.
J'ai beau m'éloigner du camion, je n'arrive pas à m'enlever du nez cette odeur de charogne qui me colle à la peau et qui imprègne tous mes vêtements. On dirait même que les odeurs sont plus fortes à mesure que je m'éloigne.
No matter how far I go from the truck, I can't get the scent of carrion that sticks to my skin and permeates all my clothes out of my nose. It even seems that the smell is stronger as I move away.
Je m'aperçois bientôt que le terrain vague dans lequel je marche est en fait un dépotoir, et un dépotoir d'un genre particulier: partout, autour de moi, je vois des piles d'ossements desséchés et des carcasses d'animaux presque entièrement recouvertes de mouches.
I soon realise that the vacant lot in which I walk is in fact a dumping ground, and a dumping ground of a particular kind: everywhere, around me, I see piles of dried bones and carcasses of animals almost entirely covered with flies.
- De ce côté-ci du mur, le terrain appartient à mon père, m'explique Yan. De l'autre côté, c'est le domaine de M. Allard. C'est lui qui a demandé à mon père de laisser de la viande se décomposer le long de la clôture. Pour mon père, c'est du gaspillage: il en aurait faire de la saucisse.
- On this side of the wall, the land belongs to my dad, Yan explains. The other side, it's Mr. Allard's domain. It's him who asked my dad to let the meat depose along the fence. For my dad, it's a waste: he would make sausage out of it.
- Mais à quoi ça sert de laisser pourrir de la viande?
- But what is the point of letting the meat rot?
- Ça sert à chasser les intrus. Si un promeneur a envie de marcher le long de la palissade, il change vite d'idée. C'est moins cher qu'on chien de garde, et Allard peut faire ses petites affaires en paix...
- That is used to chase away intruders. If a pedestrian wants to walk along the fence, he quickly changes his mind. It's cheaper than a watchdog, and Allard can do his small business in peace.
Je dois avouer que le système de dissuasion de M. Allard est très efficace. Sauf pour les rats, évidemment. Les rats, les mouches, les corneilles, les goélands...
I must admit that Mr. Allard's deterrent system is very effective. Except for rats, obviously. Rats, flies, crows, gulls.
- Suis-moi, me dit Yan, qui semble être arrivé à l'endroit qu'il cherchait. Une des planches est brisée à cet endroit, ce qui rend l'escalade plus facile.
- Follow me, Yan says, who seems to have arrived at the place he was looking for. One of the boards is broken at this place, which makes climbing easier.
Yan grimpe et saute de l'autre côté. J'en fais autant, et nous nous retrouvons dans une pinède très bien entretenue. Le bonhomme Desjardins aimerait cet endroit: les arbres sont bien dégagés, sans broussailles pour leur faire concurrence. J'aime cette plantation, moi aussi: les pins sont des colonnes qui se dressent bien haut dans le ciel, c'est frais et ombragé, et les aiguilles qui recouvrent le sol forment un épais tapis moelleux, dans lequel mes pieds s'enfoncent. Après le terrain vague du père de Yan, n'importe quelle forêt me ferait penser au paradis terrestre, mais celle-ci est particulièrement réussie, d'autant plus que les pins dégagent une odeur qui masque celle de la charogne.
Yan climbs and jumped up to the other side. I do the same, and we found ourselves in a well maintained pine forest. Old man Desjardins liked this place: the trees are well cleared, without brush to compete with each other. I like this plantation, me as well: the pine trees are in columns which rise high in the sky, it's cool and shaded, and the needles that cover the ground form a thick soft carpet, in which my feet sink. Next to Yan's dad's wasteland, any forest would make me think of earthly paradise, but it is particularly successful, especially since the pines give off a smell that masks the smell of the meat.
Nous marchons silencieusement dans ce paradis jusqu'à ce nous arrivions à des piles de pneus. Derrière ces piles de pneus, la piste de course...
We walk quietly in this paradise until we get to the pile of tires. Behind this pile of tires, the race track.
- Ça fait bizarre, je sais, dit Yan, qui s'est aperçu de ma surprise. L'entrée que nous prenons d'habitude est de l'autre côté, et il faut faire un long détour pour y arrive. Par ici, c'est pas direct. Et plus discret. Mais tu n'es pas au bout de tes surprises, crois-moi.
- It's weird, I know, Yan says, noticing my surprise. The entrance we usually take is the other side, and it takes a long detour to get there. This way, it's not direct. And more discreet. But you are not at the end of your surprises, believe me.
Nous continuons à marcher dans ma forêt jusqu'à ce que nous arrivons au cimetière.
We continue to walk in the forest until we get to the cemetery.
- Regarde bien, dit Yan. Tu vas comprendre.
- Look carefully, Yan said. You will understand.
Je regarde et je vois des pierres tombales tout à fait normales, comme on en verrait dans n'importe quel cimetière. Devant certaines de ces pierres, la terre a été fraîchement retournée. Jusque-là, rien d'anormal: nous sommes dans un cimetière, après tout, et il faut s'attendre à ce qu'il serve. Ce qui n'est pas normal cependant, et je mets du temps à m'en apercevoir, c'est la dimension des fosses. À moins d'enterrer un géant, une fosse devrait être rectangulaire, et un peu plus grande qu'un cercueil. Mais dans ce cimetière-là, les trous sont carrés et trois fois plus grands qu'un cercueil normal, comme si...
I look and see completely normal tombstones, as you would see in any cemetery. In front of these stones, the ground has been freshly turned. Until then, nothing abnormal: we are in a cemetery, after all, and we must expect it to serve. What is not normal however, and I take time to realise it, is the size of the pits. Unless you bury a giant, a pit should be rectangular, and a little longer than a coffin. But in this cemetery, the holes are square and three times larger than a normal coffin, as if...
- Allard s'occupe de tout, m'explique Yan. Il fait enlever les autos accidentées avec ses dépanneuses, il les fait compacter, puis il les enterre... Telles quelle. Avec les pilotes dedans, Ça revient moins cher.
- Allard takes care of everything, Yan explains. He has damaged cars removed with tow trucks, he compacts them, then he buries them... As is. With the racers in there, it's cheaper.
- ... Comment as-tu fait pour savoir ça?
- ... How did you know that?
- Je savais qu'il y avait un cimetière sur le terrain d'Allard, mais je pensais que c'était le dernier vestige d'un village abandonné. C'est quand tu as posé ta question à propos des ambulances que j'ai eu la puce à l'oreille. Je suis venu voir, et j'ai bien été obligé d'admettre la vérité. Le pire, c'est que je ne suis sûrement pas le seul à m'en douter. Mais personne ne veut vraiment savoir...
- I know that there was a cemetery in Allard's property, but I thought that it was the last vestige of an abandoned village. It's when you asked your question about the ambulances that I got the chip in the ear. I came to see, and I had to admit the truth. the worst part is that I am certainly not the only one to suspect it. But no one really wants to know.
Je ne l'écoute plus que d'une oreille distraite: je viens tout juste de m’apercevoir que des noms sont gravés sur les pierres tombales. Des noms que je ne connais pas. Sauf un: Patrick Desjardins, décédé l'année dernière. Il avait vingt ans.
I only listen to it with a distracted ear: I just noticed that names are engraved on the tombstones. Names that I don't know. Except one: Patrick Desjardins, who died last year. He was 20 years old.
- Ce n'est pas tout, ajoute Yan. Avant d'aller te chercher, je suis passé par la clinique et j'ai réussi à mettre la main sur nos dossiers médicaux. D'après les dernier tests, il semble que nous ayons le corps aussi usé que si nous avions cinquante ans. Ils veulent nous faire faire encore deux courses, ensuite ils nous élimineront. Peut-être qu'ils ont déjà creusé un trou pour nous...
- That isn't all, Yan adds. Before I went to pick you up, I went through the clinic and managed to get our medical records. From the latest tests, it looks like that our bodies are as worn out as if we are 50 years old. They want us to do two more races, and then they will eliminate us. Maybe they have already dug a hole for us...
- ... Qu'est-ce que vous faites ici, vous autres?
- What are you doing here?
Je me retourne et je vois Allard, entouré de deux de ses semblables. Yan et moi pourrions nous sauver sans risquer de nous faire rattraper: ces trois adipeux-là ne peuvent certainement pas courir, et encore moins escalader une palissade. Nous sauver un courant, voilà ce qu'il y a de mieux à faire, et c'est sûrement ce que nous ferions si les deux gardiens n'étaient pas armés de carabines de chasse. Ils mettent chacun deux cartouches dans le canon, en faisant le plus de bruit possible: shlik shlak shlak...
I turn around and I see Allard, surrounded by two of his fellows. Yan and I could save ourselves without risking being caught: these three fat people certainly can not run, and even less climb a fence. Running away is the best thing we can do, and that is surely what we would do if the two guards were not armed with hunting rifles. They each put cartridges in the barrel, making the loudest noise possible: shlik shlak shlak...